Exposition
Khvay Samnang. L'Homme-caoutchouc
Satellite 8 : une proposition de Erin Gleeson
Du 02 juin au 27 septembre 2015
Jeu de Paume - Paris
Voir le portrait filmé de l’exposition :
S’inscrivant dans la continuité de précédentes œuvres comme Untitled (2011) et Where is my Land ? (avec Nget Rady, 2014), Khvay Samnang fait avec Rubber Man [L’Homme-caoutchouc] (2015) acte de résistance poétique dans un paysage contesté.
Durant plus d’une année, il s’est rendu à plusieurs reprises dans la province de Rotanah Kiri, dans les hautes terres du nord-est du Cambodge, pour constater l’altération de l’environnement – des derniers villages aux défrichements calculés, des jeunes hévéas aux plantations adultes.
La triple projection vidéo donne à voir ces paysages qui forment l’environnement de l’action de l’artiste : il déverse sur son corps du latex frais puis entreprend, tel un fantôme égaré, de traverser les rangs ordonnés des cultures forestières intensives.
À mesure que disparaît la forêt, Khvay Samnang pose la question : « Où vivront alors les esprits ? »
Avec subtilité et souvent humour, Khvay Samnang propose des interprétations nouvelles de l’histoire,
de questions actuelles controversées et de pratiques culturelles anciennes.
La pratique pluridisciplinaire de Khvay Samnang (né en 1982 à Svay Rieng, Cambodge) se déploie
dans la performance, la photographie, la vidéo et l’installation. Nourri par son instinct et la rumeur,
son expérience personnelle et les médias, Khvay Samnang s’intéresse à des situations inextricables
qui, selon lui, nécessitent une intervention. Accomplissant des gestes symboliques et intentionnellement futiles, il propose de nouvelles interprétations d’événements historiques et de
questions d’actualité controversées, qui résistent à la langue des médias et des rapports officiels, souvent manichéenne.
Avec Rubber Man [L’Homme-caoutchouc] (2015), œuvre conçue pour la programmation Satellite 8, Khvay Samnang s’est attaché à la question du legs colonial et, plus spécifiquement, au problème de l’aménagement du territoire. Il y a cent trente et un ans, en 1884, les terres de la monarchie khmère sont privatisées par l’Indochine française. Peu après, des graines d’hévéa sont importées du Brésil. Les Français introduisent ensuite une vision économique qui amorce une nouvelle approche et une transformation physique et spirituelle de la nature cambodgienne en vue de l’exploitation de ses ressources. La première concession foncière cambodgienne est accordée en 1922 pour une plantation d’hévéas qui demeure la plus vaste au monde jusqu’en 1975.
Le mot français caoutchouc, transcription d’un terme indigène d’Amérique du Sud désignant la
gomme de l’hévéa, a lui-même été repris par la langue khmère. Sur cet « arbre qui pleure », le latex s’écoule de l’incision faite dans l’écorce telles des larmes. Sans doute l’allusion la plus mordante au mot gomme est celle de l’effacement, qui renvoie à l’intensification actuelle de l’exploitation coloniale des forêts et de la culture cambodgiennes.
Plus d’une vingtaine de groupes ethniques vivent dans les hautes terres du Cambodge. Leurs cultures, leurs langues et leur histoire diffèrent de celles de la population khmère des basses terres. Les esprits de la forêt et ceux des ancêtres jouent un rôle essentiel et omniprésent dans leur vie quotidienne, qui observe un cycle de subsistance complexe mêlant plantation, transplantation, récolte et régénération. Menacés par de multiples formes de colonialisme, nombreux sont les groupes implantés dans la région qui ont malgré tout réussi à résister aux conséquences des régimes qui se
sont succédé au cours du siècle dernier au Cambodge. Leurs croyances spirituelles ont efficacement assuré la conservation de la forêt et de la faune malgré les concessions foncières et les industries agro-alimentaires favorisant les puissances économiques actuelles. Des individus aux multinationales en passant par les gouvernements, ces puissances représentent la menace la plus redoutable pesant aujourd’hui sur ces communautés à la culture immémoriale.
Commissaire : Erin Gleeson
Partenaires
Exposition présentée dans le cadre de la programmation Satellite coproduite par le Jeu de Paume,
la Fondation Nationale des Arts Graphiques et Plastiques (FNAGP)
et le CAPC musée d’art contemporain de Bordeaux.
La Fondation Nationale des Arts Graphiques et Plastiques est partenaire permanent de la programmation Satellite
L’Association des Amis du CAPC
contribue à la production des œuvres de la programmation Satellite.
Le Jeu de Paume est membre des réseaux Tram et d.c.a, association française de développement des centres d’art.
Partenaires média
Art press, ParisArt, Slash-paris.com, Souvenirs from earth TV, Radio Nova.