Ed van der Elsken, Beethovenstraat, Amsterdam, 1967. Nederlands Fotomuseum Rotterdam © Ed van der Elsken / Ed van der Elsken Estate, courtesy Annet Gelink Gallery

Dès le début des années 1950, Ed van der Elsken pratique la photographie couleur, qui est pourtant largement dénigrée à cette époque. En effet, elle est alors considérée comme triviale et souvent associée à l’imagerie publicitaire. Ce parti pris traduit, une fois de plus, le peu de cas qu’il pouvait faire des normes et des conventions. Lors de ses déambulations dans les rues d’Amsterdam qui se poursuivent après les années 1960, mais aussi lors de ses reportages à travers le monde, il manifeste un intérêt particulier pour la polychromie de la ville moderne et les personnes dont il peut exacerber l’apparence vestimentaire par le procédé couleur. La photographie de ces trois femmes saisies dans l’élan de leur marche en témoigne, ainsi que son plaisir à s’adonner à la prise de vue dans la rue : Van der Elsken joue avec ses sujets, se dissimule, les suit et finit souvent par les interpeller afin de détourner leur regard vers l’objectif. Deux d’entre elles se tournent vers le photographe et semblent amusées par sa harangue. Ses modèles se trouvent ainsi souvent piégés entre une attitude naturelle et celle qu’ils adoptent plus ou moins consciemment pour la prise de vue. La rencontre a lieu : ce point de contact semble chez Van der Elsken au moins aussi importante que le cliché obtenu.

Archive magazine (2009 – 2021)

L'Amsterdam polychrome d'Ed van der Elsken

Ed van der Elsken a photographié Amsterdam, sa ville natale, pendant plus de trente ans.



Dès le début des années 1950, la photographie de rue en noir et blanc laisse progressivement place dans sa pratique à la photographie couleur, qui est pourtant largement dénigrée à cette époque. En effet, elle est alors considérée comme triviale et souvent associée à l’imagerie publicitaire. Ce parti pris traduit le peu de cas qu’il pouvait faire des normes et des conventions.


Lors de ses déambulations dans les rues d’Amsterdam, il manifeste un intérêt particulier pour la polychromie de la ville moderne et les personnes dont il peut exacerber l’apparence vestimentaire par le procédé couleur. La photographie de ces trois femmes saisies dans l’élan de leur marche en témoigne : elles semblent s’affranchir d’un même pas, par le port de la mini-jupe, des codes conservateurs qui régissent encore les Pays Bas. Véritable révolution dans le monde de la mode et symbole incontournable de l’émancipation de la femme dans les années 1960, ce vêtement, créé en Angleterre par Mary Quant, a été adopté massivement dans les sociétés occidentales jusqu’à gagner, non sans difficultés, les collections de haute couture.


Van der Elsken met en valeur cette liberté nouvelle à travers ses prises de vue qui s’apparentent souvent à un jeu : il se dissimule, suit ses sujets et finit souvent par les interpeller afin de détourner leur regard vers l’objectif. Deux des trois femmes de cette photographie se tournent vers lui et semblent amusées par sa harangue. Ses modèles se trouvent ainsi souvent piégés entre une attitude naturelle et celle adoptée plus ou moins consciemment face à l’appareil photographique. La rencontre a lieu : ce point de contact semble chez Van der Elsken au moins aussi importante que le cliché obtenu.


Cécile Tourneur