Archive magazine (2009 – 2021)
Meeting Point #4 Dork Zabunyan & Pierre Alain Trévelo
Une conversation autour de l'œuvre de Gordon Matta-Clark, avec Pierre Alain Trévelo, architecte et co-fondateur de l’agence TVK, à qui l’on doit notamment la reconfiguration de la Place de la République en 2013.
Pierre Alain Trévelo : L’anarchitecture qui vient
La nécessité de revenir sur le travail de Gordon Matta-Clark s’explique entre autres par la mise en valeur de pans méconnus d’une œuvre protéiforme. L’exposition « Gordon Matta-Clark anarchitecte » et son catalogue y parviennent grâce à la façon dont l’une et l’autre font découvrir un Matta-Clark réellement engagé dans son temps, soucieux des sans-noms et des sans-parts de son époque, sans qu’il ait pour autant la coquetterie, devenue si fréquente aujourd’hui, de clamer que son art est forcément politique. Discuter de sa relation à l’architecture doit nous aider à poursuivre cette exploration qui élargit notre perception de l’environnement urbain dans lequel intervenait Matta-Clark, de Paris à New York en passant par Berlin, tout en nous invitant à questionner notre propre rapport à la ville aujourd’hui, dans nos inquiétudes persistantes comme dans nos enthousiasmes diffus. C’est la double orientation de la conversation qui suit avec Pierre Alain Trévelo, architecte et co-fondateur de l’agence TVK, à qui l’on doit notamment la reconfiguration de la Place de la République en 2013, ainsi qu’une réflexion décisive sur le devenir du périphérique parisien. Il s’agit ainsi de laisser entrevoir un Matta-Clark qui n’est pas seulement un artiste du chantier ou de la destruction, mais aussi bien un architecte qui renouvelle les coordonnées des lieux, en les glorifiant parfois, comme c’est le cas pour Day’s End qui avait vocation, d’après Matta-Clark lui-même, à se transformer en un véritable « temple d’eau et de lumière ». D’autre part, et Pierre Alain Trévelo y insiste dans nos échanges, il s’agit de réinvestir tout ce qui relève de ces étendues ou zones intermédiaires qui intéressaient tant Matta-Clark, non pas, là non plus, pour célébrer une esthétique de l’abandon ou de la déshérence urbaine, mais plutôt pour rester aux aguets de tous les espaces, aussi infimes soient-ils, où une communauté, même éphémère, se recrée et se régénère.
Dork Zabunyan