Mimmo Jodice
Mimmo Jodice 1978 Vera fotografia [Vraie photographie]
Tirage au gélatino-bromure d'argent sur papier baryté, avec écriture au stylo de la main de l'artiste
Courtesy Galerie Karsten Greve St. Moritz, Cologne, Paris
© Mimmo Jodice

À lire

Chronologie 1960-1975

Exposition Renverser ses yeux. Autour de l'arte povera

1960

3 mai : Exposition personnelle de Piero Manzoni, Corpi d’aria, à la galerie Azimut de Milan, dans laquelle sont présentés des ballons à gonfler et à placer sur un trépied, telle une sculpture. Les ballons sont fournis dans un emballage conçu par l’artiste. Il existe une variante, Fiato d’artista, où les ballons sont gonflés par l’auteur lui-même. Le 21 juillet, pour son exposition Consumazione dell’arte. Dinamica del pubblico. Divo rare l’arte, Piero Manzoni propose au public de manger des œufs durs sur lesquels il a apposé son empreinte digitale à l’encre. Prolongement du ready-made duchampien, cette action illustre le pouvoir symbolique de l’œuvre d’art en tant que communion directe entre l’artiste et son public.

1961

13 janvier : Action Sculture viventi de Piero Manzoni, réalisée pour le Filmgiornale SEDI à Milan, durant laquelle il signe le corps de modèles et de participants, puis leur délivre un certificat établissant qu’il·elle « a été signé·e par ma main et donc est considéré·e à partir de la date ci-dessous comme œuvre d’art authentique et véritable ». Autre œuvre qui se rapproche de cette idée, la Base magica – Scultura vivente est un simple socle sur lequel l’individu qui y prend place acquiert le statut d’œuvre d’art. De 1959 à 1961, Piero Manzoni est filmé par Gian Paolo Maccentelli durant la réalisation de quatre actions (Linee, Aree e sfere di gomma per opere d’arte, Divorare l’arte et Sculture viventi) dans le cadre des Cine- giornali, courts métrages projetés dans les cinémas avant les films.

12 août : Première apparition de Merda d’artista de Piero Manzoni dans l’exposition In villeggiatura da Pescetto à Albisola.

1962

Michelangelo Pistoletto réalise ses premiers Quadri specchianti (« Tableaux-miroirs »), qui seront exposés à la galerie Galatea à Turin du 27 avril au 14 mai 1963. Après avoir visité l’exposition, les galeristes parisiens Ileana et Michael Sonnabend décident de représenter l’artiste et le mettent en contact avec le galeriste new-yorkais Leo Castelli.

1963

6 février : Décès de Piero Manzoni à l’âge de 29 ans, des suites d’un infarctus, dans son atelier du 16 rue Fiori-Chiari, à Milan.

9 février : Inauguration du nouvel espace de la galerie La Tartaruga, piazza del Popolo à Rome. Cette galerie, fondée en 1954 par Plinio De Martiis, devient rapidement un lieu de rencontre et d’échange pour les intellectuels romains. Des artistes tels que Jannis Kounellis, Pino Pascali, Cesare Tacchi et Eliseo Mattiacci y font leurs débuts avec leur première exposition personnelle. Dans ce nouvel espace, De Martiis continue à exposer les artistes italiens auxquels il est lié, parmi lesquels Fabio Mauri ou Giosetta Fioroni.

Novembre : Création de la revue Marcatrè par Eugenio Battisti à Gênes, qui promeut une approche transversale et décloisonnée de l’art, convoquant aussi bien la littérature, la musique ou le design industriel que les arts visuels. Y collaborent de grands mais également le jeune Germano Celant, chargé des comptes rendus d’exposition. La revue cessera de paraître en novembre 1970 après soixante-deux numéros.

Publication de Piero Manzoni. Life and work, le testament artistique de l’artiste. Ce livre est considéré comme le premier livre d’artiste italien de la période.

1964

Mai : Inauguration de la galerie Gian Enzo Sperone à Turin avec l’exposition collective Rotella, Mondino, Pistoletto, Lichtenstein. Le galeriste expose de nombreux artistes étrangers, notamment américains, et participe à l’introduction du pop art américain en Italie. Il organise la première exposition personnelle d’Andy Warhol en Italie en 1965. À partir de 1966, le nombre d’artistes italiens exposés augmente, et notamment les protagonistes du futur arte povera, présentés en 1966 sous la catégorie environmental art.

Du 20 juin au 18 octobre : 32e Biennale d’art contemporain de Venise. Les artistes pop sont exposés dans le pavillon américain et Robert Rauschenberg remporte le Grand Prix de peinture.

1965

À partir du 11 novembre : Exposition personnelle de Giulio Paolini à la galerie Notizie à Turin. L’artiste présente ses premiers travaux purement photographiques, principalement des toiles émulsionnées qui explorent la figure de l’artiste, dont Académie 3.

Alighiero Boetti réalise une cinquantaine de dessins à l’encre de Chine représentant des objets manufacturés, souvent liés au monde des médias (caméras, microphones, appareils photographiques…). Cette série ne sera exposée qu’en 1981 à Paris, à la galerie Chantal Crousel.

1966

Janvier : Exposition personnelle de Luciano Fabro à la galerie Notizie à Turin, où l’artiste présente notamment In cubo, un cube dans lequel on se glisse – un espace neutre qui permet à l’artiste de se projeter. L’exposition est accompagnée d’un dépliant illustré de photographies de Giovanni Ricci.

Juin et juillet : Exposition Arte abitabile organisée à la galerie Gian Enzo Sperone à Turin qui marque « le début des expériences italiennes dans le domaine de l’environmental art, à travers la recherche d’un rapport total avec l’espace » (Germano Celant). Des travaux de Piero Gilardi, Gianni Piacentino et Michelangelo Pistoletto y sont présentés.

1967

Mars : Création de la revue bit par Daniela Palazzoli à Milan, en collaboration avec Germano Celant et Tommaso Trini. Cette revue mensuelle est un bulletin d’information traitant de la scène artistique italienne et internationale, illustré de photographies, dans lequel domine une esthétique psychédélique, en phase avec l’esprit de la contre-culture. Sa publication cessera en novembre 1968 après neuf numéros. Les principaux mouvements artistiques contemporains italiens y sont représentés, notamment l’arte povera, l’architettura radicale et les recherches autour de la poesia visiva.

13 avril : Inauguration de la galerie Il Diaframma, créée par Lanfranco Colombo à Milan, avec une exposition du photographe Paolo Monti. Cette galerie, l’une des premières consacrées exclusivement à la photographie en Italie, exposera dans les années suivantes Mario Cresci, Mimmo Jodice, Luigi Ghirri, Ugo Mulas ou encore Franco Vaccari.

Du 26 avril à courant septembre : Exposition Il museo sperimentale d’arte contemporanea conçue par Eugenio Battisti et Germano Celant à la GAM (Galleria Civica d’Arte Moderna et Contemporanea) de Turin. Cette exposition est organisée à partir d’un corpus d’œuvres par plus de deux cents artistes, réuni à partir de 1963 par l’historien de l’art Eugenio Battisti et confié en 1966 à la GAM. L’objectif est de rapprocher la création artistique de l’étude de l’art : ainsi, les œuvres sont présentées accompagnées de documents et de pièces d’archives.

Juin : Fondation du magazine Flash Art par Giancarlo Politi à Milan. Il s’agit d’un journal mensuel d’information sur l’art à grand tirage. Dans le numéro 5, paru en novembre 1967, Germano Celant publie l’article « Arte povera. Appunti per una guerriglia », manifeste du mouvement. Ce texte conteste l’aliénation de l’artiste par le marché de l’art et promeut une révolution esthétique et culturelle permettant à l’artiste de s’émanciper de l’œuvre en tant qu’objet.

À partir du 8 juin : Exposition Lo spazio degli elementi. Fuoco, immagine, acqua, terra à la galerie L’Attico à Rome, installée dans un appartement de la place d’Espagne. Les artistes y présentent des œuvres qui soulignent la convergence d’éléments naturels avec le monde artificiel. Cette exposition est souvent considérée comme le point de départ de l’arte povera. Elle rassemble des œuvres d’Umberto Bignardi, Mario Ceroli, Piero Gilardi, Jannis Kounellis, Pino Pascali, Michelangelo Pistoletto et Mario Schifano.

Du 2 juillet au 1er octobre : Exposition Lo spazio dell’immagine, conçue par Umbro Apollonio, Maurizio Calvesi, Giorgio De Marchis et Gillo Dorfles au Palazzo Trinci à Foligno (Ombrie). Prenant comme point de départ l’Ambiente spaziale de Lucio Fontana, présenté dans l’exposition, chaque artiste ou groupe d’artistes dis- pose d’une pièce du palais qu’il peut investir à sa guise. Mario Ceroli, Luciano Fabro, Eliseo Mattiacci, Pino Pascali et Michelangelo Pistoletto y participent. À un moment où de nombreux artistes opèrent une rupture avec les formes traditionnelles de représentation, cette recherche sur l’espace reçoit un grand écho. De nombreux journalistes, critiques et photographes relatent et documentent l’événement.

Du 27 septembre au 20 octobre : Exposition Arte povera – Im spazio conçue par Germano Celant à la galerie La Bertesca à Gênes. C’est à l’occasion de cette exposition que le terme arte povera, inventé par Germano Celant, fait son apparition. Alighiero Boetti, Luciano Fabro, Jannis Kounellis, Giulio Paolini, Pino Pascali et Emilio Prini sont exposés aux côtés d’artistes proches de leur esthétique, comme Mario Ceroli, Eliseo Mattiacci, Paolo Icaro ou Cesare Tacchi, tous rassemblés ici sous le terme im spazio, pour immagine spazio (« Espace de l’image »).

Décembre : Ouverture du Deposito d’arte presente à Turin. Ce lieu, autogéré par les artistes qui gravitent autour du galeriste Gian Enzo Sperone, est à la fois un espace de création, d’exposition et de vente des œuvres. Loin du white cube de la galerie ou du salon du collectionneur, ce nouveau type de lieu permet aux artistes d’expérimenter des formes de présentation inédites, mêlant par exemple œuvres plastiques et performances théâtrales. Il fermera ses portes en juin 1969.

À partir du 4 décembre : Exposition Con temp l’azione organisée par Daniela Palazzoli dans les galeries Christian Stein, Gian Enzo Sperone et Il Punto à Turin, avec notamment Giovanni Anselmo, Alighiero Boetti, Luciano Fabro, Mario Merz, Michelangelo Pistoletto et Gilberto Zorio. Le titre de l’exposition joue sur le mot contemplation, qui devient « avec le temps, l’action ». À cette occasion, Michelangelo Pistoletto réalise une performance où il déambule dans la ville avec son œuvre Scultura da passeggio, une gigantesque boule en papier.

Fondation du Studio 9702 par Luciano Giaccari à Varèse. Le studio rassemble des milliers de vidéos de Luciano Giaccari documentant, sur plus de quarante ans, la scène de l’avant-garde italienne. Giaccari a accompagné les artistes dans leur volonté de contrôle de la médiatisation de leurs œuvres performatives ou éphémères, jouant ainsi un rôle essentiel dans la reconnaissance de leurs travaux au cours des années 1970.

1968

Mars : Création de la revue Cartabianca par Fabio Sargentini, directeur de la galerie L’Attico à Rome. Les trois premiers numéros sont dirigés par Alberto Boatto, qui en fait un lieu de débat critique avec la participation d’Achille Bonito Oliva, Maurizio Calvesi ou Germano Celant. La revue cessera de paraître en mai 1969.

Du 6 au 31 mai : Exposition Il Teatro delle mostre conçue par Plinio De Martiis à la galerie La Tartaruga à Rome. Chaque jour, un artiste est invité à investir l’espace de la galerie avec un accrochage, une installation ou une action. Y participent entre autres Giosetta Fioroni, Laura Grisi, Fabio Mauri, Giulio Paolini, Emilio Prini et Paolo Icaro. Un catalogue est édité, préfacé par Maurizio Calvesi, accompagné de légendes d’Achille Bonito Oliva et illustré de photographies de Plinio De Martiis.

À partir du 15 juin : Faredisfarerifarevedere 0106768, exposition personnelle de Paolo Icaro à la galerie La Bertesca à Gênes. Le titre (« fairedéfairerefairevoir ») indique la qualité organique d’un processus créatif qui opère sans discontinuité. L’exposition est l’occasion d’une documentation photographique publiée dans la revue Pallone.

Du 22 juin au 20 octobre : 34e Biennale d’art contemporain de Venise. Pino Pascali y est invité, ainsi que Michelangelo Pistoletto. Quelques jours avant l’ouverture, l’événement est perturbé par des étudiants qui dénoncent l’instrumentalisation de l’art par les élites, ainsi que par une présence policière massive. La quasi-totalité des artistes italiens, ainsi que les Espagnols, les Français et les Scandinaves invités, retirent leurs œuvres des expositions ou font fermer leur pavillon.

Juillet : Publication du premier numéro de la revue Pallone, éditée par la galerie La Bertesca à Gênes. La revue publie des textes et des photographies réalisés par les artistes Pier Paolo Calzolari, Palo Icaro, Renato Mambor et Emilio Prini. Elle constitue un lieu d’expression pour ce groupe encore en formation : ils y montrent, par exemple, des photographies de voyages faits ensemble ou de souvenirs avec leurs amis.

28 septembre : Décès de Pino Pascali dans un accident de moto. Ses funérailles sont photographiées par Mario Cresci.

Du 4 au 6 octobre : Événement Arte povera più azioni povere organisé par Germano Celant dans le cadre de la 3e édition de la Rassegna internazionale delle arti figurative di Amalfi, créée par Marcello Rumma. L’événement rassemble des œuvres des artistes italiens déjà exposés par Germano Celant et quelques artistes étrangers (Richard Long, Jan Dibbets, Ger Van Elk…) présentées dans les arsenaux d’Amalfi, ainsi que des actions, parfois spontanées, disséminées dans toute la ville et des tables rondes entre artistes et critiques. De nombreux photographes et vidéastes dont Gerry Schum sont présents.

21 décembre : Inauguration du nouvel espace de la galerie L’Attico à Rome dans un garage de la via Beccaria avec la projection des films Libro di santi di Roma Eterna de Alfredo Leonardi et SKMP2 de Luca Maria Patella sur les figures de la scène artistique romaine, ainsi que d’un documentaire de Jean-Luc Godard et Jean-Pierre Prévost sur Mai 68.

1969

À partir du 14 janvier : Exposition Dodici cavalli vivi de Jannis Kounellis à la galerie L’Attico à Rome. Cet événement durant lequel l’artiste présente douze chevaux vivant dans les nouveaux locaux de la galerie L’Attico constitue l’une des propositions les plus marquantes de l’art italien de cette période.

À partir du 21 février : Exposition 2121969 de Giulio Paolini à la galerie De Nieubourg à Milan. Il y montre entre autres son Autoritratto sous les traits de Poussin, Giovane che guarda Lorenzo Lotto et Saffo. L’exposition est accompagnée d’un livre d’artiste dans lequel un texte de Paolini, donnant un titre et une clé de lecture, apparaît sur la reproduction de chaque œuvre.

Du 22 mars au 27 avril : Exposition Live in Your Head: When Attitudes Becomes Form conçue par Harald Szeemann à la Kunsthalle de Berne. Le commissaire réunit près de soixante-dix artistes internationaux pour cette exposition devenue mythique, qui vise à présenter l’art contemporain au-delà de l’art minimal. Les Italiens (Giovanni Anselmo, Alighiero Boetti, Pier Paolo Calzolari, Jannis Kounellis, Mario Merz, Michelangelo Pistoletto, Pino Pascali, Emilio Prini et Gilberto Zorio) constituent la nationalité la plus représentée après les Américains. Le catalogue de l’exposition comporte en introduction trois articles, dont un en italien, « Nuovo alfabeto per corpo e materia », rédigé par Tommaso Trini.

21 septembre : Événement Campo urbano: interventi estetici nella dimensione collettiva urbana, organisé par Luciano Caramel, Ugo Mulas et Bruno Munari à Côme. Quarante-deux artistes sont invités à présenter des installations, performances, concerts et happenings dans les rues de la ville. Les interventions permettent de questionner la place de l’art dans la société, sa capacité à répondre à des besoins et à proposer des solutions, parfois radicales ou polémiques. Cette journée est documentée dans un catalogue qui reproduit les photographies d’Ugo Mulas.

Germano Celant publie Arte povera, ouvrage essentiel dans l’affirmation de l’avant-garde internationale et la présence d’artistes italiens en son sein. Chaque artiste dispose de six pages qu’il occupe notamment par des photographies et documents soigneusement sélectionnés et mis en page. Les Italiens représentés sont Giovanni Anselmo, Alighiero Boetti, Pier Paolo Calzolari, Luciano Fabro, Jannis Kounellis, Mario Merz, Giulio Paolini, Giuseppe Penone, Michelangelo Pistoletto, Emilio Prini et Gilberto Zorio. Le livre paraît simultanément en Italie, en Allemagne, en Angleterre et aux États-Unis.

1970

Du 31 janvier au 28 février : Exposition Gennaio 70: comportamenti, progetti, mediazioni organisée par Renato Barilli, Maurizio Calvesi, Andrea Emiliani et Tommaso Trini au Museo Civico de Bologne. Pour cette initiative inédite, les commissaires prêtent aux artistes du matériel audiovisuel pour enregistrer des performances qui seront retransmises dans l’exposition sur des téléviseurs. Dans son compte rendu, Maurizio Calvesi explique que « la place jadis occupée dans les maisons par la peinture ou la gravure a été usurpée par le petit écran » et que cette substitution doit s’opérer également dans l’espace du musée. Giovanni Anselmo, Alighiero Boetti, Pier Paolo Calzolari, Gino De Dominicis, Luciano Fabro, Jannis Kounellis, Eliseo Mattiacci, Mario Merz, Giulio Paolini, Luca Maria Patella, Giuseppe Penone, Michelangelo Pistoletto, Emilio Prini, Gilberto Zorio participent à l’événement. Les vidéos ont malheureusement été perdues.

Juin : Fondation d’Information Documentation Archive (IDA) par Germano Celant et Ida Gianelli à Gênes, un centre de documentation sur l’art et l’architecture contemporains. En un an, mille cinq cents documents (diapositives, films, journaux, communiqués de presse, publications…) sont collectés et classés en trois catégories : arte povera, art conceptuel et land art.

Du 12 juin au 12 juillet : Exposition Conceptual art – arte povera – land art organisée par IDA à la GAM de Turin. Cette exposition de Germano Celant permet d’asseoir la reconnaissance internationale de l’arte povera en présentant le mouvement à l’égal des grands courants de l’art américain contemporain. Le catalogue, qui réunit les témoignages des artistes participant à l’exposition, est un document important dans l’histoire des avant-gardes des années 1970.

Du 30 juin au 30 septembre : Événement Amore mio organisé par un collectif d’artistes dirigé par Achille Bonito Oliva au Palazzo Ricci à Montepulciano. Il s’agit d’un véritable lieu de rencontre pour une communauté d’artistes qui favorise la mise en place d’un réseau d’influences mutuelles. Dans l’exposition, les participants sont invités à indiquer les noms des œuvres ou actions des autres artistes avec lesquelles ils entretiennent une affinité particulière.

Du 2 juillet au 20 septembre : Exposition Information organisée par Kynaston McShine au MoMA à New York, qui regroupe une centaine d’artistes internationaux, parmi lesquels Giulio Paolini, Giuseppe Penone, Michelangelo Pistoletto, Emilio Prini et Luciano Fabro. Pendant l’exposition sont également projetés le film SKMP2 de Luca Maria Patella ainsi que les vidéos des performances présentées pour Gennaio 70 à Bologne plus tôt dans l’année. La structuration des avant-gardes et leur institutionnalisation se mettent en place.

30 novembre : Gerry Schum diffuse le programme Identifications à la télévision en RFA. Après Land art, ce deuxième projet d’« exposition télévisuelle » montre des performances filmées par Gerry Schum et conçues en collaboration avec les artistes Giovanni Anselmo, Alighiero Boetti, Pier Paolo Calzolari, Gino De Dominicis, Mario Merz et Gilbero Zorio notamment.

Du 30 novembre 1970 au 31 janvier 1971 : Exposition Vitalità del negativo nell’arte italiana 1960/70 conçue par Achille Bonito Oliva au Palazzo delle Esposizioni de Rome. Cette grande exposition marque la reconnaissance institutionnelle des avant-gardes italiennes, alors que le Palazzo delle Esposizioni s’ouvre à l’art contemporain pour la première fois depuis la guerre. L’architecte Piero Sartogo propose une scénographie et un dispositif inspirés de ceux expérimentés dans les galeries les plus innovantes. Une dizaine de télévisions retransmettent à l’extérieur ce qui se déroule à l’intérieur du bâtiment, dans une véritable mise en scène de l’exposition elle-même. Graziella Lonardi Buontempo fonde, à cette occasion, les Incontri internazionali d’arte qui accompagnent l’institutionnalisation des avant-gardes italiennes par l’organisation d’expositions et d’événements.

Création de la galerie Multipli à Turin par Giorgio Persano. Active jusqu’en 1975, cette galerie a effectué un important travail sur la question du multiple, considéré alors comme le support d’une nouvelle recherche expressive. Giorgio Persano travaille avec les artistes de l’arte povera (Giovanni Anselmo, Alighiero Boetti, Pier Paolo Calzolari, Giulio Paolini, Giuseppe Penone, Michelangelo Pistoletto ou Gilberto Zorio), ainsi qu’avec quelques autres artistes conceptuels italiens (Salvo, par exemple).

1971

6 février : projection d’Identifications de Gerry Schum à la galerie Sperone, à Turin. La série est également diffusée les 19 et 20 février à la galerie L’Attico à Rome, les 3 et 4 mars à la galerie Toselli à Milan et le 16 mars à la galerie San Fedele dans la même ville, ainsi que lors de la Biennale de Venise de 1972.

6 juillet : Ouverture de la videosaletta de la galerie Diagramma à Milan, une salle de projection de vidéos, en partenariat avec le Studio 9702 de Luciano Giaccari. Des extraits de vidéos documentaires y sont projetés dans le but de rendre la vidéo non institutionnelle accessible au public.

Septembre : Création de la revue Data par Tommaso Trini à Milan. La revue, à laquelle participent nombre de critiques d’art engagés, veut tirer les conclusions de dix ans d’expérimentation artistique en Italie et tourner la page de Mai 68 pour penser un nouveau compromis entre artistes, critiques et galeristes. De nombreux artistes sont également invités pour s’exprimer dans les pages de la revue et la photographie y est très présente, à la fois comme œuvre et comme médium d’information. Dans le premier numéro, Germano Celant publie l’article « Book as artwork 1960/70 » qui préfigure l’intérêt croissant pour le livre d’artiste.

Du 24 septembre au 1er novembre : 7e Biennale de Paris, au Parc floral de Vincennes. La participation italienne est orchestrée par Achille Bonito Oliva, avec notamment Alighiero Boetti, Pier Paolo Calzolari, Gino De Dominicis, Luciano Fabro, Paolo Mussat Sartor, Jannis Kounellis, Giulio Paolini, Giuseppe Penone, Emilio Prini ou encore Gilberto Zorio. Le commissaire organise plusieurs sections qui couvrent tout le champ de la création : art conceptuel, théâtre, photographie, architecture, cinéma et musique. Giuseppe Penone expose Svolgere la propria pelle, tandis que Gilberto Zorio présente la série de photographies tirée de l’action Fludità Radicale, filmée par Gerry Schum l’année précédente dans le cadre de ses Identifications.

À partir de 1971, le Centro Studi e Archivio della Comunicazione (CSAC), créé par Arturo Carlo Quintavalle en 1968 au sein de l’université de Parme, organise des expositions de photographes américains, Diane Arbus, Lee Friedlander ou Joel Meyerowitz, pour faire connaître leur travail en Italie et pousser la recherche à s’en emparer. Le CSAC a joué un rôle fondamental dans la reconnaissance et l’institutionnalisation de la photographie, et plus généralement des langages des médias en Italie.

1972

Juin : Exposition TV out 1 organisée par Luciano Giaccari à Venise. Elle est composée de films diffusés sur des écrans de télévision dans les rues de Venise en partenariat avec la galerie Del Cavallino, l’un des rares lieux spécialisés dans la vidéo en Italie.

Juin et juillet : Exposition I denti del drago, vita e morte del libro nell’era post-gutemberghiana conçue par Daniela Palazzoli à la galerie L’Uomo e l’Arte à Milan, première exposition sur le livre d’artiste en Italie. Valorisant soixante-deux artistes et auteurs, l’exposition explore les transformations du livre au contact des médias de masse, passant de réceptacle du savoir à objet producteur de sensations visuelles, tactiles et olfactives.

Du 11 juin au 1er octobre : 36e Biennale d’art contemporain de Venise. Les artistes italiens sont présents dans plusieurs expositions conçues par Francesco Arcangeli, Renato Barilli, Gerry Schum et Daniela Palazzoli. Par ailleurs, dans l’exposition Opera o comportamento, Franco Vaccari installe une cabine de photomaton dans laquelle les visiteurs sont invités à se photographier puis à accrocher sur les murs leur portrait, remplissant progressivement l’espace. Cette Esposizione in tempo reale constitue une initiative d’un genre totalement nouveau où l’artiste, tout en effaçant sa présence, suscite un processus de création artistique autonome et anonyme. Gino De Dominicis y présente Seconda soluzione d’immortalità (l’universo è immobile), une installation faisant appel à Paolo Rosa, un jeune homme atteint de trisomie 21, assis avec le panneau Deuxième solution d’immortalité à ses pieds, quelques œuvres de l’artiste devant lui. L’œuvre fait scandale à cause de la participation du jeune homme dont le consentement ne peut être établi et la salle est fermée. Enfin, Ketty La Rocca présente Appendice per una supplica dans la section « Performance and Video-tape », organisée et produite en partie par Gerry Schum.

Du 30 juin au 8 octobre : Documenta 5 organisée par Harald Szeemann à Kassel. L’événement, qui est considéré comme la documenta la plus importante, invite les principales figures de la scène italienne à exposer (Alighiero Boetti, Pier Paolo Calzolari, Gino De Dominicis, Luciano Fabro, Jannis Kounellis, Mario Merz, Giulio Paolini, Giuseppe Penone, Vettor Pisani et Gilberto Zorio). La photographie y est très présente mais, comme à la Biennale de Venise, la critique ne s’en empare pas et traite plutôt des performances, du livre d’artiste ou de la vidéo.

Fin de l’année : Création du studio de production de vidéos Art/Tapes/22 par Maria Gloria Bicocchi à Florence. En mettant ses moyens à disposition des artistes italiens et étrangers (Gino De Dominicis, Jannis Kounellis, Giulio Paolini, Allan Kaprow), ce lieu favorise la production de près de cent cinquante vidéos en seulement quatre ans. À sa fermeture en 1976, les bandes vidéo et les archives du studio sont transférées à l’Archivio Storico delle Arti Contemporanee (ASAC) de la Biennale de Venise.

1973

Du 28 février à avril : Exposition Combattimento per un’ immagine – fotografi e pittori, conçue par Luigi Carlucci et Daniela Palazzoli à la GAM de Turin. L’exposition présente plus de cent cinquante artistes internationaux et quatre cents œuvres produites depuis l’invention de la photographie. La partie consacrée au xxe siècle est l’occasion pour Daniela Palazzoli d’établir un bilan des rapports entre photographie et peinture mettant en évidence l’usage récurrent de la photographie par les avant-gardes des années 1960. Cette exposition constitue l’un des moments essentiels de la reconnaissance artistique de la photographie en Italie.

2 mars : Décès d’Ugo Mulas. Au début du mois de mai commence sa rétrospective, Ugo Mulas. Immagini e testi, au Palazzo della Pilotta à Parme, sous le commissariat d’Arturo Carlo Quintavalle du CSAC. Pour la première fois, la série des Verifiche (1968-1972) est exposée dans son intégralité, aux côtés d’autres recherches de l’artiste.

Novembre : Création du Centro videoarte di Palazzo dei Diamanti, dirigé par Lola Bonora, au sein de la Galleria d’Arte Moderna e Contemporanea de Ferrare. Le centre collectionne jusqu’à quatre cent cinquante documents vidéo au croisement de la performance, de l’art conceptuel, du body art et du land art. Il s’agit de la première initiative publique concernant l’art vidéo en Italie, complétée par l’organisation du festival annuel U/Tape.

Du 29 novembre 1973 au 28 février 1974 : Exposition Contemporanea conçue par Achille Bonito Oliva dans le nouveau parking souterrain de la Villa Borghese à Rome avec plus de trois cent cinquante artistes internationaux. Cette exposition est répartie en dix sections : art, cinéma, théâtre, architecture et design, photographie, musique, danse, livres et disques d’artistes, poésie visuelle et concrète, information alternative. La section sur la photographie est dirigée par Daniela Palazzoli. L’art vidéo est quant à lui présent dans la section art, tandis que la section cinéma présente des films d’artistes.

1974

Du 10 mars au 28 avril : exposition Fotomedia organisée par Daniela Palazzoli au Museum am Ostwall de Dortmund. L’exposition se divise en deux sections composées d’artistes italiens ayant travaillé d’un côté avec la photographie et de l’autre avec la vidéo, notamment Pier Paolo Calzolari, Ketty La Rocca, Giulio Paolini, Claudio Parmiggiani et Franco Vaccari. L’exposition est également présentée à Milan du 24 mars au 13 avril 1975 à la Rotonda della Besana.

Juin : Commercialisation des premiers magnétoscopes en Italie.

Du 6 juillet au 8 septembre : Exposition Projekt ‘74 – Kunst Bleibt Kunst organisée par Marlies Guterich à la Kunsthalle de Cologne, portant sur la vidéo, le film et la performance avec de nombreux artistes internationaux, notamment Vito Acconci, Giovanni Anselmo, Mario Merz, Giulio Paolini, Giuseppe Penone, Salvo et Gilberto Zorio.

1975

31 mai : Performance Intellettuale de Fabio Mauri à la Galleria d’Arte Moderna de Bologne. L’artiste projette le film Il Vangelo secondo Matteo de Pier Paolo Pasolini sur le torse du réalisateur. Il s’agit de la première d’une série d’expositions impliquant des projections sur divers supports (corps nus, ventilateur, chaise, bâtiment…).

Décembre : Création de l’Istituto Nazionale per la Grafica, issu de la fusion du Gabinetto dei Disegni e delle Stampe et de la Calcografia Nazionale. Cette nouvelle institution a pour objectif de sauvegarder, inventorier et diffuser les biens culturels liés à toute technique de reproduction des images : estampe, photographie, cinéma, vidéo. Marina Miraglia, directrice de la section photographique, met en place une politique volontariste d’acquisitions qui soutient la création photographique contemporaine.

Chronologie établie par Flavio Rugarli