
Archive magazine (2009 – 2021)
Dorothea Lange
Ève Lepaon et Cécile Tourneur, conférencières et formatrices au Jeu de Paume, proposent un aperçu du parcours commenté qu'elles réalisent dans l'exposition « Dorothea Lange. Politiques du visible » au Jeu de Paume.
Agrandir les images pour accéder aux commentaires.

Paul Schuster Taylor, l’auteur de cette photographie, est sociologue et professeur d’économie à l’Université de Berkeley, États-Unis, lorsqu’il découvre, en 1934, dans le studio photographique de Willard Van Dyke à Oakland, les premières images de Dorothea Lange sur les conséquences de la crise économique. La collaboration qui s'ensuit, l’équilibre et la complémentarité entre les textes de Taylor et les images de Dorothea Lange, vont convaincre Roy Stryker, chef de la section historique de la Farm Security Administration, de donner une place importante à la photographie dans le cadre des programmes menés par les agences fédérales pour aider les agriculteurs et les réfugiés. Ce portrait est révélateur de la personnalité et de la démarche de Lange : représentée dans son activité de photographe munie de son appareil Graflex, qu’elle stabilise en utilisant son genou comme un trépied, elle prend de la hauteur, aiguise son point de vue sur un vaste paysage rural du Texas. Celui de Paul Taylor, en contre-plongée, met en valeur la photographe, la grandit et révèle l’engagement physique de Lange lors des prises de vue, reflet de ses convictions sociales. La voiture, sur laquelle elle est assise, sera son second outil de travail. Traversant le territoire des États-Unis de l’Est vers l’Ouest, elle suit les familles d’agriculteurs, quittant leur région et leurs exploitations pour chercher de meilleures conditions de vie et de travail ailleurs. Elle documente ainsi l’importante migration interne qui caractérise l’histoire de ce pays jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
Cécile Tourneur

Sur la route, Dorothea Lange rencontre de nombreux migrants, qui, fuyant la misère et le chômage, tentent de gagner la côte ouest des États-Unis. Cette image des marcheurs que l’on retrouve à la fin des Temps modernes de Charlie Chaplin (1936) ou celle de familles entassées dans des voitures surchargées de modestes biens personnels, s’inscrivent dans la représentation de la conquête de l’Ouest tout en devenant, dans les années 1930, le symbole de son renouvellement dramatique lors de la Grande Dépression. Munis de quelques bagages, ces deux hommes se dirigent vers un horizon incertain. La silhouette de l’homme de gauche occulte le point de fuite, signe d’une errance sans but que l’on perçoit aussi dans le roman contemporain de John Steinbeck, Des souris et des hommes. La verticalité de leur stature semble faire écho aux poteaux électriques qui scandent le bord de la chaussée. De même, la régularité de ces derniers peut évoquer les vagues de migrants semblables à ceux-là qui se succèdent alors sur les routes. Dorothea Lange offre un contrepoint ironique à cette situation en incluant, dans la partie droite de la composition, un panneau publicitaire pour la « Southern Pacific », riche compagnie de chemin de fer américaine. À la posture debout des hommes marchant s’oppose la position assise de l’homme sur son siège inclinable. À leur fatigue et à leur endurance s’oppose le slogan de la compagnie ferroviaire : « Next Time Try The Train. Relax » [La prochaine fois, essayez le train. Relaxez-vous] et à la photographie documentaire, le dessin et le message publicitaire. Dorothea Lange témoigne ainsi de manière critique des disparités de la société américaine, mettant face à face l’image de sa super puissance et les conséquences sociales de la Crise.
Ève Lepaon

Dorothea Lange traverse les exploitations agricoles et les champs de coton où les cueilleurs travaillent dix heures par jour pour deux dollars, comme l’indique le commentaire qui accompagne cette image. Le tirage exposé est un recadrage par rapport au négatif original. Dorothea Lange resserre ainsi son attention et celle du spectateur sur les mains de cet homme. Cachant une partie de son visage, ce geste semble témoigner d’une volonté de se dissimuler, mais traduit également une réalité des conditions d’exploitation de ces ouvriers : leur corps se réduit à leurs mains, leur force de travail, sans prendre en compte ce qui peut se lire sur leurs visages, leurs émotions et leurs pensées. La main droite est agrippée à son outil, les lignes et les écorchures du bois se prolongent à travers celles de la peau abîmée par le soleil et les gestes répétitifs de l’activité. La main qui cache la bouche, foyer de la parole, renvoie également à la démarche de Dorothea Lange qui encourage l’échange, la discussion et le récit par les travailleurs de leur propre histoire, qui est rarement considérée. L’oralité, présente en creux dans le travail de Dorothea Lange, se retrouve également dans la littérature de cette époque, notamment à travers l’application de John Steinbeck, dans les dialogues de ses romans, à retranscrire fidèlement les expressions et la musicalité de la parole de ceux à qui on ne la donne jamais, et que l’on entend résonner dans l’adaptation cinématographique des Raisins de la colère par John Ford en 1940.
[C.T.]

City of Oakland. Gift of Paul S. Taylor Dorothea Lange prend cette photographie en février ou mars 1936 dans un campement de cueilleurs de pois, à Nipomo, en Californie. L’exposition reconstitue la séance de prises de vue qui a duré dix minutes, depuis la première image, la découverte de cette famille sans ressources installée dans une tente de fortune, jusqu’à la dernière, le portrait resserré de cette femme avec ses enfants blottis contre elle. Cette image a eu tendance à éclipser le reste du travail de Dorothea Lange pour la Farm Security Administration. Sa diffusion massive dans la presse en a fait le symbole de l’Amérique en crise. Contrairement à sa démarche habituelle, Dorothea Lange n’a ni collecté, ni retranscrit le témoignage précis de cette femme. Aussi, cette image n’a jamais eu de titre définitif et plusieurs légendes, plus ou moins approximatives, y ont été associées, dont celle de « Mère migrante », aujourd’hui communément employée, alors même que cette femme était originaire de Californie. Or, c’est précisément cette décontextualisation, exceptionnelle dans le travail de Lange, sa dimension plus émotionnelle que documentaire et ses références à l’histoire de la peinture (l’iconographie de la Vierge à l’Enfant ou de la Charité) qui expliquent le succès de cette photographie dans la presse de l’époque et sa réception critique. La publication du témoignage de cette femme, Florence Owens Thomson, en 1978, très critique à l’égard de la fabrication et de la diffusion de cette image qui l’a transformée en icône de la Grande Dépression et ainsi figée dans une situation de victime, a suscité de nombreux débats et réflexions dans le champ de la photographie et des médias, notamment de la part de Martha Rosler ou de Susan Meiselas. Cette image permet encore aujourd’hui de réinterroger le rapport au sujet et la réception dans la pratique documentaire.
[E.L.]

Le portrait de cette « ancienne esclave à la longue mémoire » témoigne de l’attention portée par Dorothea Lange aux conditions de vie de la main d’œuvre afro-américaine. Elles reproduisent plusieurs décennies après l’abolition de l’esclavage un système oppressif et de domination. Au centre de l’image, cette travailleuse, tenant fermement un bâton, dévoile des mains noueuses. Le sommet du crâne est protégé par un foulard, sans doute pour contrer l’exposition au soleil durant de longues heures de labeur dans les champs de coton. L’expression de son visage, ses sourcils froncés, sa lèvre inférieure en avant, la veine saillante dans son cou, indiquent une tension : elle semble raconter son histoire. Ces éléments, retranscrits sous la forme de citations ou de légendes, précisent et révèlent ce que l’on ne peut pas deviner dans les images. L’ouvrage An American Exodus: A Record of Human Erosion, conçu et publié avec Paul Schuster Taylor en 1939 – pendant une interruption du contrat de Dorothea Lange avec la FSA – s’ouvre avec une série de photographies et de textes sur le « Vieux Sud », où l’on peut découvrir le portrait d’un couple, tous les deux « nés sous l’esclavage ». Les corps photographiés associés aux paroles prononcées permettent conjointement la transmission de cette histoire complexe. En contrepoint de la commande de la FSA, qui attend que la photographe documente le quotidien des réfugiés blancs et écarte ce type d’images, Dorothea Lange dénonce, au sein de son travail, la ségrégation particulièrement forte dans les États du Sud, en Alabama et dans le Mississipi.
[C.T.]

Au lendemain de l'attaque de Pearl Harbor, les États-Unis entrent en guerre et prennent, dès 1942, des mesures à l'encontre du Japon et des Américains d’origine japonaise. Dorothea Lange répond à une commande de la War Relocation Authority visant à montrer que la population déplacée et internée dans des « centres de relocalisation » est bien traitée. Parallèlement, le photographe Ansel Adams réalise dans le camp de Manzanar de nombreux portraits en gros plan de modèles souriants et des scènes quotidiennes qui paraissent heureuses avec, en arrière-plan, les sublimes montagnes de la Sierra Nevada. Si ses photographies sont immédiatement diffusées par la propagande américaine, celles de Dorothea Lange, classées « archives militaires », resteront invisibles jusqu'à leur première publication en 2006. Tout en respectant le cahier des charges qui lui est donné (ne montrer ni fils barbelés entourant le camp, ni miradors, ni militaires), Dorothea Lange s'attache à décrire les corps dans leur environnement, et, comme souvent, à présenter précisément le contexte. Son point de vue sur le sujet est perceptible à travers son souci du détail, la rédaction de légendes développées ou critiques accompagnant chaque image et ses choix de composition. Cette photographie donne à voir l'enfermement sans le montrer directement : par la convergence des lignes et l'occultation du point de fuite, la répétition et la régularité des formes et la présence dominante du drapeau américain planté en son centre. Encore une fois, Dorothea Lange adapte son mode opératoire à son sujet : de même que le cadre de la photographie révèle celui du camp, l'image de la tempête de poussière évoque autant l'étouffement physique que son effacement.
[E.L.]

Paul Schuster Taylor, l’auteur de cette photographie, est sociologue et professeur d’économie à l’Université de Berkeley, États-Unis, lorsqu’il découvre, en 1934, dans le studio photographique de Willard Van Dyke à Oakland, les premières images de Dorothea Lange sur les conséquences de la crise économique. La collaboration qui s'ensuit, l’équilibre et la complémentarité entre les textes de Taylor et les images de Dorothea Lange, vont convaincre Roy Stryker, chef de la section historique de la Farm Security Administration, de donner une place importante à la photographie dans le cadre des programmes menés par les agences fédérales pour aider les agriculteurs et les réfugiés. Ce portrait est révélateur de la personnalité et de la démarche de Lange : représentée dans son activité de photographe munie de son appareil Graflex, qu’elle stabilise en utilisant son genou comme un trépied, elle prend de la hauteur, aiguise son point de vue sur un vaste paysage rural du Texas. Celui de Paul Taylor, en contre-plongée, met en valeur la photographe, la grandit et révèle l’engagement physique de Lange lors des prises de vue, reflet de ses convictions sociales. La voiture, sur laquelle elle est assise, sera son second outil de travail. Traversant le territoire des États-Unis de l’Est vers l’Ouest, elle suit les familles d’agriculteurs, quittant leur région et leurs exploitations pour chercher de meilleures conditions de vie et de travail ailleurs. Elle documente ainsi l’importante migration interne qui caractérise l’histoire de ce pays jusqu’à la Seconde Guerre mondiale.
Cécile Tourneur

Sur la route, Dorothea Lange rencontre de nombreux migrants, qui, fuyant la misère et le chômage, tentent de gagner la côte ouest des États-Unis. Cette image des marcheurs que l’on retrouve à la fin des Temps modernes de Charlie Chaplin (1936) ou celle de familles entassées dans des voitures surchargées de modestes biens personnels, s’inscrivent dans la représentation de la conquête de l’Ouest tout en devenant, dans les années 1930, le symbole de son renouvellement dramatique lors de la Grande Dépression. Munis de quelques bagages, ces deux hommes se dirigent vers un horizon incertain. La silhouette de l’homme de gauche occulte le point de fuite, signe d’une errance sans but que l’on perçoit aussi dans le roman contemporain de John Steinbeck, Des souris et des hommes. La verticalité de leur stature semble faire écho aux poteaux électriques qui scandent le bord de la chaussée. De même, la régularité de ces derniers peut évoquer les vagues de migrants semblables à ceux-là qui se succèdent alors sur les routes. Dorothea Lange offre un contrepoint ironique à cette situation en incluant, dans la partie droite de la composition, un panneau publicitaire pour la « Southern Pacific », riche compagnie de chemin de fer américaine. À la posture debout des hommes marchant s’oppose la position assise de l’homme sur son siège inclinable. À leur fatigue et à leur endurance s’oppose le slogan de la compagnie ferroviaire : « Next Time Try The Train. Relax » [La prochaine fois, essayez le train. Relaxez-vous] et à la photographie documentaire, le dessin et le message publicitaire. Dorothea Lange témoigne ainsi de manière critique des disparités de la société américaine, mettant face à face l’image de sa super puissance et les conséquences sociales de la Crise.
Ève Lepaon

Dorothea Lange traverse les exploitations agricoles et les champs de coton où les cueilleurs travaillent dix heures par jour pour deux dollars, comme l’indique le commentaire qui accompagne cette image. Le tirage exposé est un recadrage par rapport au négatif original. Dorothea Lange resserre ainsi son attention et celle du spectateur sur les mains de cet homme. Cachant une partie de son visage, ce geste semble témoigner d’une volonté de se dissimuler, mais traduit également une réalité des conditions d’exploitation de ces ouvriers : leur corps se réduit à leurs mains, leur force de travail, sans prendre en compte ce qui peut se lire sur leurs visages, leurs émotions et leurs pensées. La main droite est agrippée à son outil, les lignes et les écorchures du bois se prolongent à travers celles de la peau abîmée par le soleil et les gestes répétitifs de l’activité. La main qui cache la bouche, foyer de la parole, renvoie également à la démarche de Dorothea Lange qui encourage l’échange, la discussion et le récit par les travailleurs de leur propre histoire, qui est rarement considérée. L’oralité, présente en creux dans le travail de Dorothea Lange, se retrouve également dans la littérature de cette époque, notamment à travers l’application de John Steinbeck, dans les dialogues de ses romans, à retranscrire fidèlement les expressions et la musicalité de la parole de ceux à qui on ne la donne jamais, et que l’on entend résonner dans l’adaptation cinématographique des Raisins de la colère par John Ford en 1940.
[C.T.]

City of Oakland. Gift of Paul S. Taylor Dorothea Lange prend cette photographie en février ou mars 1936 dans un campement de cueilleurs de pois, à Nipomo, en Californie. L’exposition reconstitue la séance de prises de vue qui a duré dix minutes, depuis la première image, la découverte de cette famille sans ressources installée dans une tente de fortune, jusqu’à la dernière, le portrait resserré de cette femme avec ses enfants blottis contre elle. Cette image a eu tendance à éclipser le reste du travail de Dorothea Lange pour la Farm Security Administration. Sa diffusion massive dans la presse en a fait le symbole de l’Amérique en crise. Contrairement à sa démarche habituelle, Dorothea Lange n’a ni collecté, ni retranscrit le témoignage précis de cette femme. Aussi, cette image n’a jamais eu de titre définitif et plusieurs légendes, plus ou moins approximatives, y ont été associées, dont celle de « Mère migrante », aujourd’hui communément employée, alors même que cette femme était originaire de Californie. Or, c’est précisément cette décontextualisation, exceptionnelle dans le travail de Lange, sa dimension plus émotionnelle que documentaire et ses références à l’histoire de la peinture (l’iconographie de la Vierge à l’Enfant ou de la Charité) qui expliquent le succès de cette photographie dans la presse de l’époque et sa réception critique. La publication du témoignage de cette femme, Florence Owens Thomson, en 1978, très critique à l’égard de la fabrication et de la diffusion de cette image qui l’a transformée en icône de la Grande Dépression et ainsi figée dans une situation de victime, a suscité de nombreux débats et réflexions dans le champ de la photographie et des médias, notamment de la part de Martha Rosler ou de Susan Meiselas. Cette image permet encore aujourd’hui de réinterroger le rapport au sujet et la réception dans la pratique documentaire.
[E.L.]

Le portrait de cette « ancienne esclave à la longue mémoire » témoigne de l’attention portée par Dorothea Lange aux conditions de vie de la main d’œuvre afro-américaine. Elles reproduisent plusieurs décennies après l’abolition de l’esclavage un système oppressif et de domination. Au centre de l’image, cette travailleuse, tenant fermement un bâton, dévoile des mains noueuses. Le sommet du crâne est protégé par un foulard, sans doute pour contrer l’exposition au soleil durant de longues heures de labeur dans les champs de coton. L’expression de son visage, ses sourcils froncés, sa lèvre inférieure en avant, la veine saillante dans son cou, indiquent une tension : elle semble raconter son histoire. Ces éléments, retranscrits sous la forme de citations ou de légendes, précisent et révèlent ce que l’on ne peut pas deviner dans les images. L’ouvrage An American Exodus: A Record of Human Erosion, conçu et publié avec Paul Schuster Taylor en 1939 – pendant une interruption du contrat de Dorothea Lange avec la FSA – s’ouvre avec une série de photographies et de textes sur le « Vieux Sud », où l’on peut découvrir le portrait d’un couple, tous les deux « nés sous l’esclavage ». Les corps photographiés associés aux paroles prononcées permettent conjointement la transmission de cette histoire complexe. En contrepoint de la commande de la FSA, qui attend que la photographe documente le quotidien des réfugiés blancs et écarte ce type d’images, Dorothea Lange dénonce, au sein de son travail, la ségrégation particulièrement forte dans les États du Sud, en Alabama et dans le Mississipi.
[C.T.]

Au lendemain de l'attaque de Pearl Harbor, les États-Unis entrent en guerre et prennent, dès 1942, des mesures à l'encontre du Japon et des Américains d’origine japonaise. Dorothea Lange répond à une commande de la War Relocation Authority visant à montrer que la population déplacée et internée dans des « centres de relocalisation » est bien traitée. Parallèlement, le photographe Ansel Adams réalise dans le camp de Manzanar de nombreux portraits en gros plan de modèles souriants et des scènes quotidiennes qui paraissent heureuses avec, en arrière-plan, les sublimes montagnes de la Sierra Nevada. Si ses photographies sont immédiatement diffusées par la propagande américaine, celles de Dorothea Lange, classées « archives militaires », resteront invisibles jusqu'à leur première publication en 2006. Tout en respectant le cahier des charges qui lui est donné (ne montrer ni fils barbelés entourant le camp, ni miradors, ni militaires), Dorothea Lange s'attache à décrire les corps dans leur environnement, et, comme souvent, à présenter précisément le contexte. Son point de vue sur le sujet est perceptible à travers son souci du détail, la rédaction de légendes développées ou critiques accompagnant chaque image et ses choix de composition. Cette photographie donne à voir l'enfermement sans le montrer directement : par la convergence des lignes et l'occultation du point de fuite, la répétition et la régularité des formes et la présence dominante du drapeau américain planté en son centre. Encore une fois, Dorothea Lange adapte son mode opératoire à son sujet : de même que le cadre de la photographie révèle celui du camp, l'image de la tempête de poussière évoque autant l'étouffement physique que son effacement.
[E.L.]